Coupe du Monde 2022, Pelé, football martiniquais d’avant… Le légendaire artificier du Club Colonial, Claude Cayol s’exprime sur ces sujets.
Interview de Claude Cayol, ancien milieu offensif du Club Colonial, Stade Français et de Villemomble Sports mais aussi ancien entraîneur de l’Etendard de Bellefontaine, du Golden Star, la JA Trénelle et du Club Colonial :
Argentine vs France ! C’est la finale de la Coupe du Monde qui aura lieu ce dimanche. Qu’est-ce que vous retenez de cette compétition, cette année ?
“C’est une très belle compétition qui a montré que les pays progressent. Avant, il y avait de grandes nations du football. Maintenant, il y a plusieurs grandes nations du football. Les pays progressent comme ceux de l’Asie avec le Japon et la Corée du Sud. Il y a les pays de l’Afrique bien sûr avec le Maroc. L’Amérique du Sud, on connaissait déjà… Mais pendant que le football progresse, les grandes équipes ont intérêt de se méfier des petites équipes en pleine évolution.”
Le Brésil est out et Pelé est à l’hôpital. Vous avez joué contre lui en 1971. Qu’est-ce que tout cela vous inspire ?
“À distance, je souhaite que Pelé se rétablisse. Il a un certain âge (82 ans). Mais, qu’est-ce que je ressens ? Il faut remettre le contexte. Pelé a remporté l’une des plus grandes Coupes du Monde qui a existé, celle au Mexique (1970). Le Brésil gagne et Pelé éclabousse tout. Et puis, on nous dit : ‘Pelé vient en Martinique.’ Mon Dieu, c’était pour nous une immense joie de pouvoir l’accueillir ici.”
Et qu’est-ce qu’il signifie pour vous Pelé ?
“C’est le football. C’est tout ce qu’on a aimé au football. Une petite anecdote : en 1958, j’avais 12 ans, j’ai écouté la demi-finale de la Coupe du Monde (Brésil 5-2 France) sur un poste de radio. Il n’y avait pas de télévision comme aujourd’hui. On était contents déjà en 1958. Il y a aussi le fait que les Coupes du Monde repassaient après au cinéma, sur grand écran. Donc, on a découvert Pelé ou Garrincha. Mais, le plus grand, c’est Pelé. Il a toujours été et il sera toujours le plus grand footballeur au monde.”
Que retenez-vous du match de Pelé quand il vient en Martinique ?
“On les a regardés. On a essayé de faire quelque chose. Mais, ce n’était pas évident. Pelé était venu non pas avec la sélection du Brésil mais avec Santos. C’était un immense honneur pour nous. Un immense honneur ! Un an avant, il était à la Coupe du Monde au Mexique et on le regardait à la télé… Cette finale Brésil – Italie (4-1). Pelé est une étoile dans ma vie de sportif.”
Que pouvez-vous dire du football martiniquais d’avant ?
“Il y avait beaucoup de chauvinisme. Chaque joueur défendait sa commune et c’était chaud. C’est ce qui explique qu’il y avait des milliers de spectateurs au match. Il y avait une ambiance extraordinaire avec des équipes qui portaient cette ambiance. Il y avait l’Assaut à Saint-Pierre ; à Fort-de-France, il y avait le Club Colonial et le Golden Star ; dans le sud, il y avait la Renaissance de Sainte-Anne et après il y a eu Rivière-Pilote et le CS Vauclinois. L’équipe de foot était l’emblème de la commune. Un match de football était une passion. Quand on regardait le nombre de spectateurs qu’il y avait au match, on se disait que ce n’était pas possible…”
Par rapport à aujourd’hui, c’est incomparable…
“Ce n’est pas pareil. On ne va pas comparer. C’est une autre génération. Ce n’est pas le même élan. Nous, on jouait parce qu’on aimait ça. Par exemple, quand on jouait au football l’entraînement était à 5h30 du matin et il fallait aller au travail après. Ce n’était pas un sacrifice : on aimait ça ! Et donc, on donnait tout ce qu’on avait dans les tripes. Mais surtout, on défendait soit une ville soit un maillot et ça a donné ce que ça a donné.”
Vous étiez un grand footballeur du Club Colonial et de la sélection de Martinique. Pourquoi ce club de Fort-de-France est-il si symbolique en Martinique ?
“Il est symbolique parce que c’est le club doyen. On a gagné pas mal de trophées. Il y avait un esprit clubiste. Tant que le coup de sifflet final n’avait pas été prononcé, le Club n’avait pas perdu. Il y avait aussi dans les clubs de Fort-de-France, ce sentiment de représenter des quartiers. Nous, c’était plus Terres Sainville par exemple. Le Golden Star c’était Pont Desmosthène un peu. C’est ce qui créait une rivalité très chaude par moment.”
Il y a eu cette rivalité entre le Golden Star et le Club Colonial aussi quand vous partez du Club Colonial pour entraîner le Golden Star. Qu’est-ce que vous retenez ?
“Ça a été très mal compris. En novembre 1972, lors d’un match contre l’Eclair de Rivière-Salée au stade Louis Achille, j’ai une fracture de la jambe et ce n’était pas évident que je reprenne le football. Ça me tracassait beaucoup. Un an après, le président du Golden Star est venu me voir et m’a proposé de venir lui donner un coup de main. Le Club Colonial avait déjà son entraîneur. Je suis allé donner un coup de main au Golden Star comme entraîneur (NDLR : entraîneur/joueur) et ça m’a permis de reprendre un peu de moral et de recommencer à jouer au football.”
Le pronostic de Claude Cayol pour la finale de la Coupe du Monde : victoire de l’équipe de France.
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