Au lendemain du match nul de la sélection de la Martinique contre le Honduras (1-1), le président de la Ligue de football de l’île caribéenne nous a accordé un entretien.

La Martinique a fait un match nul contre le Honduras (1-1) en CNL. Comment analyses-tu la rencontre ? Il y a-t-il une forme de regret?

« Oui bien sûr. C’est l’avis des observateurs mais aussi des acteurs. Manifestement, on est passés à côté d’une meilleure performance. Effectivement, on a bien maîtrisé le match en première mi-temps. Et puis, ça s’est un peu compliqué en deuxième mi-temps. Le sélectionneur Mario Bocaly a expliqué un peu ce qui a cloché… Notamment, les blessures survenues sur un des joueurs, Johnny Marajo qui était censé faire le boulot différemment. Et également, peut-être quelques petites erreurs tactiques, de positionnements en deuxième mi-temps. Ça aurait été plus intéressant d’obtenir une victoire qui nous aurait garanti pratiquement la qualification pour la Gold Cup 2021. Mais rien n’est perdu. On attend patiemment le résultat du Honduras contre Trinidad, ce dimanche. »

Comment as-tu trouvé l’équipe du Honduras?

« On leur a posé quelques difficultés en première mi-temps puisqu’on a eu la chance d’ouvrir très tôt le score. Ensuite, on a opéré en contre-attaque et on aurait très bien pu aggraver le score. Mais, l’équipe du Honduras a eu un tout autre visage en seconde période. Il y a eu trois remplacements qui nous ont fait mal. Plus particulièrement le numéro 20. Le milieu de terrain Héctor Castellanos qui avait été laissé au repos, certainement en prévision du match de dimanche contre Trinidad. Ces trois changements ont donné beaucoup de vitesse à leur jeu. On a beaucoup souffert en deuxième mi-temps. On s’en sort bien finalement d’avoir pu maintenir le match nul jusqu’à la fin. »

Emmanuel Rivière a été l’unique buteur contre les Honduriens. Quel commentaire peux-tu faire sur sa première sélection?

« Elle s’est très bien passée pour lui et pour la Martinique. C’est dommage qu’il ait été à court physiquement. Mais, il faut le comprendre. C’est un garçon qui a joué le dimanche dernier. Il a dû sortir de l’autre bout de l’Italie pour rejoindre la France pour vite rentrer en Martinique. Il est arrivé deux jours avant la compétition. Donc sa prestation est très bonne. Dommage qu’il n’ait pas pu faire tout le match. Mais, on est très contents pour lui. On a vu toute la manifestation de sa joie après notre but. 15 ans après, Emmanuel Rivière revient sur ses terres, en Martinique pour apporter son concours à la sélection de son pays. Donc c’est très bien! »

Pourquoi est-il sorti aussi tôt ? Problème physique ou demande du club?

« Je n’ai pas l’impression qu’il y ait eu des consignes particulières de son club. Il se sentait un peu à bout de forme. Il a eu aussi une petite sensation de contractures musculaires. Il a vu ça avec le coach qui l’a ensuite soulagé. Il faut toujours prendre en compte que les joueurs professionnels doivent faire de longs voyages entre les continents pour après reprendre la compétition. Donc, il faut être raisonnable et je pense que c’est en ce sens que le changement a été fait. »

Lors de la rencontre, as-tu senti l’apport du public martiniquais ? Etais-tu satisfait de l’ambiance dans les tribunes?

« Oui ! On a rarement eu des ambiances de ce type. On avait la présence d’au moins deux groupes à pied qui ont mis l’ambiance. On a eu une bonne affluence malgré l’heure du match (21h30) et le fait qu’il soit joué en semaine (jeudi). Donc c’est de bon augure pour l’avenir. Cela démontre qu’il y a un vrai fournissement du public martiniquais pour sa sélection. C’est bien également puisqu’on peut considérer que les joueurs ont pu bénéficier de cet apport du public. »

Comment trouves-tu le travail du staff de la sélection de la Martinique?

« Personnellement, je ne suis pas étonné. Dans le staff technique et médical, ils ont tous une certaine expérience du haut niveau. Le sélectionneur adjoint, Fabrice Reuperné a été joueur de haut niveau, et un international martiniquais qui a vécu des moments importants en sélection. Mario Bocaly, le sélectionneur avait déjà été adjoint auparavant. Il est également professeur d’éducation physique au collège. C’est une personne qui a toujours fait parler de lui. Puis, notre médecin et nos deux kinés sont très bons et passionnés. Il y a vraiment une très bonne osmose à l’intérieur du staff. Il y a une très bonne communication avec les joueurs. Donc, je suis vraiment satisfait du travail fourni. Nous sommes convaincus que cela ne s’arrêtera pas là. J’espère que ce n’est que le début d’une représentation de la Martinique de haut niveau, qui ira de mieux en mieux. »

Il y a la possibilité que le football local se semi-professionnalise. Peux-tu nous faire le point?

« C’est un dossier dont on retient une très grande attention puisque ça nous tient vraiment à cœur. On travaille effectivement vers une transition du statut amateur vers un statut promotionnel voire semi-professionnel, avec la Guadeloupe notamment. Nous sommes en pleine réflexion par rapport à cela. On va certainement s’appuyer vers un statut de joueur fédéral pour pouvoir faire avancer les choses. La Guadeloupe a d’ailleurs pris un peu d’avance sur nous. On a un projet qui est peut-être un petit peu plus ambitieux et plus compliqué à mettre en place. Si ce projet aboutit, cela permettra de faire en sorte que l’évolution ne s’appuie pas uniquement sur les clubs, mais sur une structure employeuse sur le modèle de la MLS. Donc, on travaille sur ce dossier avec la fédération française, les institutions locales et les partenaires privés. On a un jeune martiniquais qui va très certainement réaliser un travail universitaire en même temps sur cette évolution des choses. On vise l’horizon 2021 pour essayer de mettre ce projet en place et peut être avoir une période expérimentale sur quatre à cinq ans pour réaliser cela. »

Et au niveau de l’adhésion à la FIFA?

« Cela n’avance pas aussi vite que l’on voudrait. Maintenant, on a deux choses à dire. La première, nous sommes en train de négocier avec la FIFA et avec les fédération Française de Football sur une augmentation de la dotation financière prévue dans le cadre de la convention de coopération avec la FIFA. Jusqu’à présent, la somme était de 300 000 dollars par an. On a eu deux années où cette somme a été touchée (2017 et 2018). Nous sommes en train de discuter sur l’attribution de cette dotation 2019 avec une revalorisation de l’ordre de 15 à 20%.

Deuxièmement, avec les instances locales et en particulier avec la collectivité territoriale, on travaille sur un dossier confidentiel qui sera présenté par la collectivité et la tutelle nationale. D’ici la fin de l’année, la presse et le public seront informés sur ce projet de politique sportive qui sera présenté et qui sera soumis à l’avis des instances de football. »

Enfin, penses-tu que les Matinino participeront à la Gold Cup 2021 grâce à une victoire du Honduras contre Trinidad?

« Bien sûr ! Je ne sais pas vraiment si je dois dire si je le pense. Au fond de moi, je crois que ça va se faire. Maintenant, nous ne maîtrisons pas notre destin. Il est quelque part entre les mains ou au bout des pieds de l’Honduras et de l’équipe de Trinidad, selon son comportement. Donc on va regarder ce match avec beaucoup d’attention. C’est vrai que nous sommes un peu en ballotage favorable compte tenu du fait que c’est Trinidad qui se déplace au Honduras dans cette fameuse ville de San Pedro Sula, où le public est tellement chauvin et farouche de son équipe. Ils vont jouer dans un stade où le Honduras s’est déjà qualifié à plusieurs reprises pour des phases finales de Coupe du Monde devant 35 000 spectateurs. On a un avantage au goal-average sur Trinidad. Donc ça se présente avec un petit ballotage favorable pour nous. On espère que tout ira dans le sens d’une qualification pour la Martinique. »